Laothoe populi (Linnaeus, 1758)
Sphinx populi Linnaeus, 1758, Syst. Nat. (Edn 10) 1: 489.
Localité type: inconnue, probablement Suède Stockholm
Le Sphinx du peuplier
Anglais: Poplar Hawkmoth;; Allemand: Pappelschwärmer; Castillan: esfinge del chopo, cuerno verde.
Taxinomie
Insecte qui ne pose pas le moindre problème en France. La population du sud de l’Espagne, principalement Andalousie, a été baptisée Laothoe populi iberica Eitschberger, Danner & Surholt, 1989. Il est totalement impossible sur le seul habitus de distinguer les exemplaires de cette région de ceux du reste de l’Europe. Cette sous-espèce repose sur d’infimes différences de l’armature génitale mâle (quelques cornuti en moins sur l’édéage). L’ayant personnellement collecté en juin 2015, je confirme l’idée de Kitching & Cadiou (2000: 129) et Pittaway qui placent cet insecte en synonymie de Laothoe populi populi (Linnaeus, 1758). Les insectes d’Iran, Géorgie, Arménie, Turquie, Irak, Turkménistan, ont été décrit sous le nom de populeti (Biniert, [1870]). Ceux des Alai Shan et Tian Shan, de l’Uzbekistan, du Tajikistan, Kirghizstan et Kazakhstan ont été nommés populetorum (Staudinger, 1887). Les taxons populeti et populetorum ont été successivement synonymisés, revalidés, synonymisés à nouveau, pour finalement revenir au rang de bonnes espèces dans une note d’Eitschberger 2002. Cette action n’est pas approuvée par Pittaway. Il n’en demeure pas moins qu’actuellement, ces espèces sont valides.
Distribution
Monde: L. populi vole dans toute l’Europe centrale et du nord. Sa répartition recouvre pratiquement celle de S. ocellata. De l’Espagne à l’Irlande, le sud de la Scandinavie, et jusqu’aux montagnes de l’Altai. On le retrouve jusqu’au nord de la Chine centrale
France: partout, surtout dans les zones humides. Atteint 1800 m dans les Alpes et les Pyrénées.
Plantes-hôtes
Surtout Salix sp. et Populus sp. Pittaway note une série de plantes qualifiées de « mineures » dont Fraxinus, Quercus, Betula, Alnus, Rosa, Crataegus, Cotoneaster, Malus, Laurus et Ulmus.
Grande espèce assez lourde, plus ronde que la majorité des Sphingidae et comme tous nos Smerinthinae A. populi ne se nourrit pas à l’état adulte. Il produit deux, voir trois générations dans l’année, la troisième étant le plus souvent partielle. Les individus provenant des chrysalides qui hibernent sont plus sombres et plus gris, tandis que la génération d’été est composée de spécimens plus grands et plus pales, souvent beige rosé et non plus gris. Dans le Lot et Garonne, on a presque l’impression de générations continues, tant l’espèce est présente pratiquement toute l’année jusqu’au début des grands froids. Les œufs et les jeunes chenilles surpris par ce froid sont probablement condamnés, le peuplier perdant très rapidement ses feuilles.
Les mâles de ce Sphinx vole assez tard dans la nuit, généralement bien après minuit. Il est parfois abondant, j’en ai souvent vu plus d’une dizaine arriver en quelques minutes sur mon mur éclairé de Laplume. C’est un des premiers à voler dans l’année, les nuits très froides ne semblant pas l’arrêter. La femelle vient aux lampes durant la première heure de la nuit.
Sa posture de repos est étonnante, l’insecte remontant haut ses ailes postérieures qui dépassent alors au delà de la costa des antérieures, à la manière de beaucoup de Lasiocampidae. Cela lui confère une apparence cryptique, camouflage remarquable si le papillon est posé sur une branche ou dans des feuilles mortes. L’abdomen des mâles, et dans une moindre mesure celui des femelles est fortement recourbé vers le haut.
La chenille consomme des Populus et Salix, mais aussi Fraxinus et Quercus spp. Elle est aussi donnée sur Betula, Alnus, Malus, Viburnum, Laurus et Prunus spp. Pittaway (1993, 103) signale que cette faculté d’accepter de telles plantes de substitution est un phénomène local et que sur la majorité de son aire de répartition, L. populi ne consomme que du peuplier et refuse toutes les autres plantes à l’exception du saule. Je partage pleinement cette opinion. Cette chenille est verte, et sa corne l’est aussi, ce qui la distingue de celle d’ocellatus. Elle est plus courte, plus massive et nettement moins mobile. Elle est beaucoup moins facile à trouver que celle d’ocellatus. Pour la distinguer des 3 autres espèces de Smerinthinae, voir ici.
On trouve assez souvent des formes de cette chenilles avec taches latérales rougeâtres.
Elle devient luisante, comme huileuse, et plus sombre avant la nymphose. Sa chrysalide est enterrée assez profondément, elle est noire mate et très rugueuse, ce qui la distingue immédiatement de celle d’ocellatus qui est brun sombre et luisante. En été, elle peut éclore en moins de 20 jours. La singularité de cette espèce est qu’elle ne produit que que 4 stades avant de se chrysalider. Je demanderais aux lecteurs de bien vouloir me confirmer cette observation d’élevage.
Edit août 2019: deux élevages successifs de l’insecte m’ont confirmé que en effet, il n’y a que 4 stades chez cette espèce.
Même si elle n’est pas vraiment visible, il est plus facile de la localiser sur les repousses de peuplier bordant les routes que sur les grands arbres. En règle générale, les adultes préfèrent pondre sur les petits arbustes isolés que sur les arbres, et ce fait est aussi valable pour les Saturniidae. On pourra rétorquer à cela qu’il est nettement plus facile de localiser une chenille sur un arbuste, ce qui n’est sans doute pas faux.
Xavier Vitureau m’a fait parvenir une série de clichés d’une surprenante forme rose de cette chenille en L4. Ces clichés ont été réalisés à Sartene, Vallée de l’Ortolo, Corse du Sud (octobre 2018).
Laothoe populi vole partout en France, mais il affectionne les biotopes humides où l’on trouve ses plantes de prédilection. On le trouve donc plus souvent à proximité des cours d’eau et le long des fossés.