Hemaris fuciformis fuciformis (Linnaeus, 1758)
Sphinx fuciformis Linnaeus, 1758, Syst. Nat. (Edn 10) 1: 493.
Localité type: Europe
Le Sphinx gazé* et parfois (rarement) le Sphinx du chèvrefeuille
*le nom de Sphinx fuciforme donné dans Wikipédia n’est jamais utilisé, c’est une invention qui provient de l’ouvrage de Rougeot & Viette (1978: 189). Sur cette page Wikipedia, le traitement des plantes-hôtes de cette espèce est totalement farfelue. Cela montre à quel point il faut se méfier de cette encyclopédie participative.
Anglais: Broad-bordered Bee Hawkmoth; Allemand: Hummelschwärmer; Castillan: cristalina borde estrecho, esfinge abejorro de orla ancha.
Taxinomie
En France, on le sépare de l’espèce suivante H. tityus (Linnaeus, 1758) de par la coloration de son abdomen, son aspect plus élancé et surtout la largeur supérieure des aires submarginales de ses ailes antérieures et postérieures. La sous-espèce Hemaris fuciformis jordani Clark, 1927 décrite du Maroc, plus grande et plus sombre, pourrait mériter selon Pittaway un statut spécifique. Toutefois, on trouve en Espagne, et même dans le sud de la France, des individus en tout point conformes aux exemplaires de l’Atlas. L’analyse génétique (barcode) montre une légère différence qui est à mon sens très insuffisante pour justifier cette décision.
Les exemplaires de la seconde génération de cet Hemaris présentent une bande submarginale produisant des dents très fines entre la nervation (forme milesiformis (Treitschke, 1834)). C’est le caractère qui est souvent donné pour séparer H. fuciformis jordani (qui présente cette dentation) d’H. fuciformis fuciformis. Ce critère n’est donc pas valide, et n’est surtout pas spécifique : il indique juste si l’insecte est éclos au printemps ou en juillet août.
Distribution
Monde: de l’Espagne à travers toute l’Europe jusqu’en Ukraine. Toute l’Europe du sud jusqu’aux Tian Shan du Tajikistan. L’insecte est donc présent en Grèce, Turquie, Iran, Afghanistan et Kazakhstan. Il n’est connu ni d’Irlande, ni d’Ecosse. Au delà de cette répartition, on connait des individus plus ou moins erratiques du « Far East » russe, et même des îles Sakhalin. Dans ces régions, l’insecte cohabite avec Hemaris affinis (Bremer, 1861). Quelques exemplaires d’H. fuciformis ont été collectés en Guyane Française aux environs de Cayenne, principalement par Marc Thouvenot. L’espèce y est probablement arrivée suite à l’introduction de plantes ornementales, au même titre que l’Hyles livornica.
France: Présent dans tous les département, surtout en biotope forestier.
Plantes-hôtes
C’est l’insecte du chèvrefeuilles par excellence. Il pond sur Lonicera sp., surtout Lonicera nigra et encore plus Lonicera xylosteum dans le sud. D’autres Caprifoliaceae sont consommées, comme Symphoricarpos sp.. La majorité des auteurs donnent des plantes mineures comme Deutzia sp. et Knautia sp., ce que je n’ai jamais observé en France. La phrase « Les plantes hôtes de la chenille sont généralement des gaillets (Galium) » de Wikipedia démontre une méconnaissance totale de l’insecte.
Cet Hemaris est beaucoup plus commun que son congénère tityus et se rencontre dans le biotopes de bocage ou franchement boisés. Il vole en deux générations sur tout notre territoire, de la mi-mai à la mi-juin puis à nouveau en août. La seconde génération n’est peut être pas totale dans la moitié nord de la France.
Il se distingue de tityus par la large aire submarginale brun rougeâtre de ces ailes, et les segments 4 et 5 de son abdomen de la même couleur.
Il butine les fleurs nectarifères dès 10 heures du matin, en particulier les Salvia, Silene, Lychnis et Buddleja spp. Son vol est rapide et il revient très régulièrement à la même fleur après avoir parcouru de grands détours dans les airs.
Dans le sud de la France, sa période d’activité est très limité, et il n’est en fait commun que 2 ou 3 semaines allant le plus souvent de la mi-mai au début juin.
Sa chenille consomme presque uniquement des feuilles de chèvrefeuille (surtout Lonicera xylosteum et L. nigra). Durant la période de vol de l’insecte, il est aisé d’en trouver des œufs en inspectant le dessous des jeunes feuilles terminales des rameaux qui dépassent largement des buissons de la plante-hôte.
L’élevage est aisé, beaucoup plus que celui de tityus à condition de maintenir les cages bien ventilées.
La chenille est vert tendre, avec le dessous du corps rougeâtre et la corne verte bleuté. Elle présente parfois des taches roses sur les flancs comme celle de tityus.
Elle forme un cocon grossier à la surface du sol, réunissant des brindilles et des débris végétaux pour se transformer en une chrysalide noire mat, plus rugueuse d’aspect que celle de tityus.
A l’éclosion, H. fuciformis à cette particularité d’avoir des écailles violacées sur ses plages hyalines, écailles qui disparaissent dès les premiers battements d’ailes. L’exemplaire femelle présenté étalé ci-dessus est d’élevage. Il n’a pas volé, et a donc toujours ces fameuses écailles.
H. fuciformis ressemble superficiellement à un hyménoptère, mais son attitude de vol ne laisse aucun doute.
Conseil. La façon le plus simple d’obtenir cette espèce est d’en rechercher les œufs. Ces derniers sont pondus sous les feuilles terminales des rameaux de chèvrefeuille. Localiser la chenille en L1 est aussi très facile, car elle trahit sa présence par le fait qu’elle attaque les feuilles par le centre, produisant alors des trous (voir chenille L1 dans la galerie) qui se repèrent plus facilement que des feuilles attaquées latéralement. Adulte, la chenille est beaucoup plus rare, les prédateurs sont passés par là, et de plus, elle est souvent parasitée. L’imago quand à lui est fréquent en bord de route et chemin forestier, butinant essentiellement les sauges. Sa période de vol est assez serrée dans le temps, l’insecte est très fréquent sur une semaine, et nettement plus rare après.